De cette époque, je garde de bons souvenirs, pas seulement parce que j’avais 11-12 ans, mais peut-être parce que c’était Brest que je retrouvais, Brest où j’étais né « intra-muros » en 34.et que mes parents avaient fui, comme beaucoup d'habitants,pour Landerneau, puis Quimper.
Au coin de la place Sadi-Carnot et de laRue Traverse la maison familiale avait été détruite, plus de musée, rien que l’abri Sadi Carnot, D'elle des murs qui appelaient au secours, un gros chauffe eau pendu.
Par contre, en face de notre ancien nid, une boulangerie y existait encore, parmi les ruines, et son propriétaire faisait encore du pain et des pâtisseries qui avaient je ne sais pourquoi un goût spécial, mêlé d’avant-guerre et de liberté.
Des baraques : une odeur d’exotisme et de renouveau. C’ était une découverte. On était loin de la maison traditionnelle à étages. Dès qu’on y entrait une odeur de liberté, de .bois et de papier goudronné se mêlait à celle indescriptible de cloisons de papier carton pelucheux.
C’était une façon de vivre, un lieu de vie totalement opposé à ceux que j’avais connus avant. Les proportions, le plein pied sur l’extérieur, en dehors de 1ou2marches, les petites fenêtres, et, cette couleur claire à l’intérieur, plus jaune de Naples que blanc et plutôt foncée. J’allais dire noire à l’extérieur mais chaude.
Et ce bois partout présent – le sol, les charpentes – horizontales ou verticales, toujours visibles, dans des lieux où ne poussaient pas encore d’arbres.
Salles de classes, salles d’études, dortoirs, réfectoires, chapelles, tout était en bois.
Ces bois ou du moins certaines chutes nous servirent à monter un toboggan les jours de neiges.
Les nuits froides, les doubles chaussettes étaient nécessaire, le gant de toilette et la serviette posé ,auprès de la cuvette et du pichet , était devenu, surtout le premier une pierre.
Il y avait l’électricité qui disparaissait sans arrêt, relayée par nos boites à cirage personnelles où une mèche flottait sur une huile. C’était un lumignon jalousement gardé des attaques des voisins, et que l’on rangeait précieusement dans la casier de notre bureau, une fois le courant rétabli.
Ce n’était pas une prison, mais un monde nouveau empreint d’espoir dans un environnement que l’on voyait pousser tous les jeudis et dimanches, lors de nos promenades de pensionnaires.
Je pense que nous avons vu Brest démarrer , du moins durant les 4 années que j’ai passées comme pensionnaire. Les sorties nous amenaient dans tous les coins de cette ville du port de commerce à l’arsenal, des égoûts immenses de la future rue de Siam, aux blockauss du Minou. Que de fois nous avons pris le pont Gueydon,tmonté et descendu l’escalier du Cours d’Ajot tandis que des prisonniers Allemands restauraient. Nous avons eu le droit à de petites sorties en mer… plutôt dans la rade. à bord d’un bateau de la direction du port. Les beaux jours nous poussaient vers kerAnna et le bain.
Lors de ces sorties, dès qu’un des accompagnateurs me le permettait, je m’échappais dans la cité commerciale, mais cela un peu plus tard. Ma grand-mère y tenait boutique. C’ était un lieu étrange. Très festif mais durable semble-t-il.Ses ruelles grouillaient de gens, les magasins quant à eux, bien qu’ils soient de petites surfaces, regorgaient de marchandises.
Les gens, de Brest et des environs se rencontraient, se parlaient de l’ancien Brest ,.se tenaient au courant des aléas de la reconstruction.
Dans ce lieu j’ y passais des heures à lécher les vitrines. Puis je rentrais, plein d’images rue Coat ar Guéven, à Bon-Secours alors installé en barraques.