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les articles sur le vitrail, succèdent à des pages de croquis mémoires ou vise versa dans le but de ne pas fatiguer le blogueur.

LES VITRAUX DU CHOEUR

L e s V i t r a u x du C hoe u r

de la cathedrale Saint Corentin

de Quimper.

 

Avant-Propos

 

Datant de 1417 à 1419, et au nombre de 13, les vitraux des baies hautes du choeur de la cathédrale Saint-Corentin de Quimper subirent de nombreuses restaurations dont la grande remise en ordre du XIXe siècle qui eut lieue en 1867 et 1868.

 

Cette restauration continuera avec les autres fenêtres hautes de la nef, en 1869 et 1870, puis du transept, en1873 en 1874. Elle fut confiée par l' Etat au verrier Antoine Lusson, 1auquel succéda le verrier Lefèvre. Il exécutera son travail de restaurateur en suivant plus ou moins les données de l'archiviste Le Men. Cette archiviste fit, peu d'années après leur repose, 1877, le reproche au verrier d'avoir" trop souvent préféré se livrer à sa propre fantaisie ".2

 

Quant à ce dernier, il fut grandement aidée, par le registre sur l'état des vitraux de la cathédrale de De Boisbilly annoté en 1820 par Aymar de Bois 3

 

Les réseaux des 13 baies du choeur, où il ne restait plus rien de leurs splendeurs du XVe, siècle, furent tous garnis par ce que Le Men nomme une "  vulgaire mosaïque " 4) Pour les réseaux des autres fenêtres hautes du transept et de la nef, qui avaient subi le même sort, il fut fourni des panneaux de vitraux à base d'anges et d'armoiries, à l'exception de deux soufflets du XVe. siècle et des bustes des évangélistes du réseau de la baie 116.Ci-dessous, la crucifixion de 1417, actuellement à Castelnaux -Bretenoux

 

 

L'état des vitraux en 1993

 

 

Malheureusement, d?autres restaurations au coup par coup eurent lieu entre 1869 et 1941, date où ces vitraux hauts, choeur, nef et transept, furent déposés par mesure de protection pour la durée de la guerre et remis en place, la paix retrouvée, au fur et à mesure des crédits

a gauche est présentée la Crucifixion de 1417, actuellement à Castelnau-  Bretenoux;

Leur état, en cette fin de Vingtième siècle, où ils furent une nouvelle fois restaurés, était dramatique.

 

En 1993, On relevait, pour les vitraux du choeur, trois niveaux de restaurations du verrier restaurateur Lusson.

1°la création entière des verrières 101 et 102 sur indications de Le Men 6N

2°la copie d'une crucifixion , il s'agit de la baie 100.

3° la restauration avec apports de pièces neuves ou de panneaux entiers.

 

Techniquement et picturalement le travail de restauration est très mal fait. Ne parlons pas de la reconstitution. Lusson n'avait pas une vue d'ensemble des vitraux. On sent un travail de restauration panneau par panneau et il n'a pas senti que ce n'était pas la même main qui avait fait ces verrières et que cependant le tout était et faisait un ensemble. Car il s'agit tout d'abord d'une galerie de donateurs avec leur saint patron. Pour les visages, entre autre, il n'a pas essayé de copier intelligemment ceux qui existaient encore. Il n?a pas compris le vêtement, les armures. Et pourtant tout se répète. Le même carton étant ici utilisé au XVe siècle pour les seigneurs donateurs C'est du travail vite fait, sans recherche personnelle de documentation. De plus, ce n'est pas, semble-t-il, le même peintre qui a travaillé sur toutes les lancettes et le manque d?unité provient de ce que chaque peintre possède sa personnalité et sa technique.. Un relâchement va même jusqu'à se sentir dans certaines baies.

 

Sur la tenue de la grisaille, il y a tout ou rien à dire. Cela dépend comment on le voit, car il ne restait quasiment rien, du moins dans le choeur. Le trait de grisaille a complètement disparu et apparaît en négatif. Les lavis ont fondu. Seuls subsistaient les jaunes d'argent. Et ce désastre est signalé dès 1904, entre autre par l'abbé Alexandre Thomas.7

 

Ce défaut ne touche que les lancettes, car pour les réseaux à motifs floraux ("  vulgaire mosaïque ") les grisailles ont bien tenu. A l'inverse, ce ne sera pas le cas des anges des baies 100, 101 et 102 comme les réseaux du transept et de la nef, Cela confirme que, très souvent au XIXe siècle, les peintres avaient chacun leur spécialité. Ci-dessous, une des baies 114 et 115 de la cathédrale.

 

 

 

D?autre part, mais ici, Lusson est en dehors du coup, et cela est valable pour tout l'édifice, les solins à la chaux n'avaient pas résisté aux intempéries, les tempêtes en avaient bousculé certains, les verres se déchaussaient, les plombs lâchaient, les attaches se rompaient. Sous l'effet du poids supplémentaire des plombs de casse, les panneaux prenaient du ventre. 8Car depuis les origines jusqu'aux années 1970, la dernière restauration a lieu en 1993-1994, le seul moyen de réparer une pièce brisée était d'incorporer un plomb dans chaque fente des pièces de verre. Aussi certaines pièces offraient-elles ainsi, au fur et à mesure des restaurations, une dizaine de morceaux de verre maintenus par des plombs, dits de casse, qui enlaidissent et détruisent la lecture du vitrail. De plus une dépose, avec stockage durant plusieurs années, dans des caisses, entreposées dans des lieux humides, suivie d'une repose, après un aller retour à Paris, tout cela n'a fait qu'aggraver leur état.

 

.Quant aux verrières du côté sud, elles avaient d'importants dépôts de gypse résultant de la décomposition de la matière vitreuse par l?effet des agents atmosphériques ( sulfates et acide sulfurique) avec formation de cratères sur la face extérieure.9

 

Approche dun descriptif

 

Il a été souvent dit que les vitraux du côté nord étaient "  réservées pour les donateurs ecclésiastiques " et ceux du sud " des donateurs laïques ".10 Pour le Nord, cela n'est pas tout à fait vrai car, sur les six fenêtres, trois seulement offrent un membre du clergé ; un évêque donateur en la baie 105 et deux chanoines donateurs en les baies 107 et 111. N

 

Cette disposition, seigneur d'un côté, clergé de l'autre n'a pas été reprise dans le reste de la cathédrale.

 

Les saints avec ou sans leur (s) donateur(s) sont tous présentés dans des arcades ou niches. Celles-ci sont au nombre de trois, pour les baies 100,101 et 102 et103 ou quatre pour les suivantes.

 

 

 

Les niches

Ces niches comportent un socle, des colonnettes, accessoires obligatoires des montants de l'ouverture où apparaît le personnage, et un dais architectural.

 

Cette façon de procéder n'est pas exclusive au vitrail, elle existe aussi en sculpture pour présenter des statues. Cela fut, peut-être au départ, un style de présentation et une décoration en plus. Mais il est dit aussi que cette façon de présenter fait suite aux déclarations de Saint Augustin, ou à une transposition, lorsqu'il dit que ce sont les Saints et les Apôtres qui nous OUVRENT LES PORTES DU CIEL. C'était peut être cela au départ, mais c'est devenu très vite un style de présentation et une décoration spécifique d'époque, le rideau remplaçant la porte.. La scène se passe devant une tenture de couleurs souvent à damas dont le dessin en grisaille est posé du côté intérieur, sauf exception. Ce rideau n'est pas sans rappeler le rideau qui ferme le Saints des Saints, mais peut être aussi celui que l'on dressait devant le choeur lors des représentations de mystère. Ce rideau se retrouve dans tous les vitraux des XVe et XVIe siècles.

 

Au XVe siècle, cette présentation est quasiment omniprésente et les peintres verriers rivalisent d'invention, de recherches et de styles dans la construction de leur architecture, qui, cependant, n'est pas sans rappeler nos édifices, ils vont même jusqu'à créer des édifices imaginaires, un peu comme Victor Hugo, et ornent chaque baie de modèles différents. Ainsi, dans les fenêtres hautes de cette Cathédrale de Quimper, on dénombre dans les vitraux près de trente architectures ou dais différents.

L'auteur et le commanditaire

Il faut bien trouver un auteur !

Pour l'auteur, nous ne pouvons souscrire à la proposition de Monsieur Le Men  offrant " Un peintre verrier de Quimper, nommé Jean Soyer ou Souhier, dit Jamin y travaillait, pendant ces trois années. 11

A la page 302 de son opuscule, il ajoute que " le premier peintre de cette famille est mentionné en 1418 ", cela au sujet d'un marché pour la restauration des vitraux de la cathédrale et de la chapelle neuve, que Le Men reconnaît comme étant la chapelle absidiale.( pro reparacione vitrorum cappelle nove).

Depuis lors, tous les articles ayant trait au Vitrail et à la cathédrale de Quimper, donnent la paternité à ce " Jamino " de 1418 et au " Johannes, seu Jaminus Sohier, vitrarius, civis Corisopitensis ", de 1474, car il faut bien donner ou trouver un auteur à une ?uvre connue.

Je ne souscris pas plus à l'assertion de l'abbé Alexandre Thomas " je dois ajouter que les vitraux eux-mêmes furent faits en 1417, 1418 et 1419, par Jamin Sohier, pères de l'artiste du même nom qui peignit les verrières de la nef et du transept " Nous verrons par la suite que ce transept et cette nef ont nécessité la présence de plusieurs ateliers, comme il en est le cas pour ce choeur.

Des vitraux payés en dehors des comptes de la fabrique.

Ces vitraux du choeur, ce sera aussi le cas pour les autres, ont été payés, cela est très plausible, pour ainsi dire de la main à la main, par des commanditaires donateurs, ici des membres du clergé et des seigneurs, à un ou des peintres verriers, en dehors des comptes de la fabrique. Peut-être était-ce un don en échange d'une fondation perpétuelle ou tout autre chose que nous verrons avec la baie 113. C'est pour cela que jusqu'à maintenant, aucun marché les concernant, en dehors de la baie 100, ne nous soit parvenu, en espérant qu?un jour ou l'autre, ils sortiront de leur silence.

En tout cas, dans le choeur, nous nous trouvons devant un programme cohérent de vitraux, mis à part quelques apports étrangers et postérieurs, d'une grande qualité et qui est, sans doute, un témoignage intéressant de l'art du vitrail au tout début du XVe siècle.

Le durée d'exécution assez courte, la composition et opposition Nord Sud, le choix prédominant de la lumière, bien dans l'esprit de l'époque pour un choeur ne peut qu'y contribuer.

Bertrand de Rosmadec, chef d'orchestre du programme.

Le chef d'orchestre de ce programme de vitraux ne peut être qu'un personnage hors du commun, car le seul fait de réussir à réunir sur un même plan, sans tenir compte des prééminences et de la hiérarchie, des seigneurs, un évêque, des chanoines, devait être un pari fou et peut révéler un véritable talent de médiateur. Ce pourrait être l'évêque de l'époque, Bertrand de Rosmadec, s'il s'agit bien de lui, qui s'est glissé humblement comme donateur dans la baie 105.

 

 

NOTE :

1. - Antoine Lusson était le fils d'un entrepreneur qui fit, en 1807, des travaux de restauration sur la couverture de la cathédrale du Mans, et qui, en 1809, remploya les vitraux des fenêtres basses de cette cathédrale pour boucher une verrière haute du choeur. L'atelier d'Antoine a, semble-t-il, été fondé au Mans en 1836, puis déménagea à Paris (1862-1875). Il possédait une succursale à Rouen, tenue par son gendre. Il était notoirement connu pour travailler sous l'égide du jésuite architecte Tournesac qui lui fit, entre autres, garnir de vitraux la chapelle de l'évêché de Quimper, rue de Rosmadec Avec ce jésuite, il travailla sur des cartons de Gérente et collabora avec les peintres verriers Lefèvre, Steinheil, auteur de la baie O de la chapelle de la Victoire, les architectes Lassus, Viollet-le-Duc, et le peintre Amaury-Duval. De1855 à 1869, il restaura les vitraux de la Sainte Chapelle.

 

Dans le Finistère, dès 1854, il exécuta les vitraux de la sacristie de la cathédrale, puis, en 1863, ceux du bas du choeur de Pouldergat, enfin à Ploaré, en 1889, ceux des bras du transept. Si l'on considère la quantité de travaux qu'il fit en France, on imagine que ce n'était pas un petit atelier, et la qualité du travail s'en est ressentie. Il n'hésite pas à demander du travail et se référencie de la Sainte Chapelle et du Père Tournesac, cf. Lettre de demande de travaux pour Notre-Dame de Locmaria à Quimper.

 

2. ' R.F.Le Men, Monographie de la cathédrale de Quimper( XIIIe , XVe Siècle, 1977, p.22

 

3.- Arch .dioc. Quimper, registre de Boisbilly, 8L1, Aymar de Blois, après avoir annoté le registre, le remit de nouveau à l'évêque de Quimper, Mgr Graveran, le 5 septembre 1842, " pour l'usage de la cathédrale "

4.- R.F. Le Men, op, cit., p. 22

5.- R. Le Moigne. Journal Ouest-France de décembre 1946 : "  Nos vitraux descendus en 1942 par crainte des bombardements n'ont pas encore quitté leurs abris "

 

6.- La numérotation des baies est celle instituée par le Corpus Vitrearum Internationale. Les numéros paires sont du côté sud et les impaires du côté nord. Les fenêtres hautes prennent les centaines et le décompte commence par la fenêtre du chevet à qui l'on donne le numéro 0 pour les bais basses et 100 pour les baies hautes.

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7.- Abbé A. Thomas, Visite de la cathédrale, 1892 ; du même, La cathédrale de Quimper, 1904

8. -Pour exemple, avant notre restauration, la moyenne du poids des vitraux au mètre carré était de 21 kilos. Après la restauration, et la suppression des plombs de casse, et malgré les doublages sur certaines pièces, cette moyenne était tombée à 13 kilos au mètre carré.

9.- La Cathédrale de Quimper, Ministère de la Culture.

 

10. - R.F. Le Men, op, cit., p.21.

11.- Le Men, op, cit. p, 21.

Jean-pierre le bihan, septembre 1999.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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